Hugues Servé

Que reste-t-il quand tout a disparu ?

Photographier les victimes d’une catastrophe n’est jamais chose facile, pour autant que l’on veuille le faire avec humanité, et respect. Il ne peut être question de voler leur image à celles et ceux qui ont déjà tout perdu. Quand, en juillet de l’année dernière, Hugues Servé part à la rencontre des victimes des inondations, il sait qu’il lui faudra prendre le temps, aider, écouter, revenir sur les lieux, écouter encore. Dans les maisons les plus touchées, les eaux ont pratiquement tout emporté.

Le photographe va tenter de montrer ce qui reste quand tout a disparu. Pour ce faire, il met en place un protocole, presqu’un rituel : les sinistré.es poseront, frontalement, face à l’objectif, avec dans les mains l’objet de leur choix, celui qui leur tient le plus à cœur, et qu’ils ont pu sauver du désastre. Vont ainsi apparaître un crucifix, une pendule, des photos, une poupée, un Coran, une trottinette, et même une improbable contrebasse.

Mais c’est l’ensemble des portraits qui impressionne le plus, par sa gravité, son intensité. Sur les visages, on peut lire la tristesse, sans doute, et parfois la sidération, mais il y a de la tendresse, aussi, des sourires s’esquissent, et les regards ne fuient pas. Les victimes ne se réduisent pas au statut que le sort leur a imposé : elles font face, et avec dignité.

Par ce très beau travail, Hugues Servé nous aura finalement livré une authentique leçon de vie.

Robert Neys